Avec Our Millennials Today, on part à la rencontre d’étudiant·es et jeunes diplômé·es qui se sont jeté·es dans le grand bain du travail. On parle aussi éducation et orientation scolaire dans les Grandes Écoles. Nageur·se confirmé·e ou amateur·rice en brassard, bienvenue 🎣
🐟 Avant le plongeon
Hola ! Laisse moi juste le temps de mettre ma bouée avant le grand saut et je suis à toi. En attendant, je te laisse explorer le sujet du jour.
Début 2020, Nathalie Hector annonce sa démission du poste de directrice de programme PGE à emlyon après avoir officié deux ans. Débauchée de KEDGE en 2018 où elle officiait aux côtés de Bernard Belletante – lui aussi démissionnaire du board de l’école –, elle retrouve rapidement un poste à la direction du développement à SKEMA. Après quelques mois de flottem…direction par intérim par Lionel Sitz, c’est aujourd’hui la directrice du programme PGE de NEOMA qui rejoint emlyon, laissant la neurchisphère de France en ébullition face à ce retournement de situation.
Au vu de cette uniformité apparente des équipes, je me suis demandé quel rôle jouait vraiment le positionnement des écoles dans leur stratégie d’acquisition.
Bonne lecture 🏊♀️
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🦀 Choisir son école ou son ordinateur même combat ?
Oui mais, le prix est-il vraiment un critère de choix ? Pourquoi sommes-nous plus enclins à ouvrir nos portefeuilles pour telle école et pas une autre ?
L’apanage du luxe est de fournir une expérience complète à son client – on achète autant l’univers, l’expérience, que l’objet. C’est bien ce que s’efforcent d’offrir à son client-élève les écoles de commerce : un environnement hors du temps et de la réalité qui te forge à devenir une personne (de préférence) influente. Et comme pour tout, cet “achat éducatif” a une valeur symbolique qui met en lumière certains de nos traits. C’est en cela que le processus choix d’une école ou d’un ordinateur se ressemblent. Que l’on soit devant le catalogue d’écoles ou au rayon tech, nos interrogations sont relativement similaires :
“Vais-je aller vers du classique (logo, partenariats, carrières à la sortie rassurantes) ou bien vers quelque chose de plus novateur ? Veux-je devenir comptable ou la prochaine licorne du paysage entrepreneurial international ? Mon but est-il de m’inscrire dans la tradition ou ouvrir ma voie ?”
Les memelords de ce monde te diraient : There are two types of people. En un mot : es-tu plutôt PC ou Apple ? Car finalement, tout revient à ça : la marque. Te souviens-tu de la publicité iconique 1984 qu’Apple a réalisé pour la sortie de son premier Macintosh ? La vision de cette femme, seul élément coloré dans un monde terne, brisant d’un coup de marteau le status quo, a affirmé en une minute chrono le positionnement avant-gardiste de la marque.... c'est probablement ce genre d’évidence que souhaitent imposer les écoles en travaillant sur leur image. Un exemple. Si je te dis : fauteuils Pantone, salle de jeu, et décor Steelcase rappelant celui de grandes structures d’innovation ? Et oui Watson ! C’est bien emlyon et son Learning Hub, icône, avec le makers’ lab, de sa pédagogie. Par ces signes, l’école entend faire rayonner sa raison d’être empreinte de valeurs entrepreneuriales et novatrices. De cette façon, en y entrant, c’est aussi cette image que tu achètes – puisque tu y seras assimilé·e ensuite.
« les objets eux-mêmes pourront devenir parole, s’ils signifient quelque chose » Roland Barthes, Mythologies
Quelque soit le domaine, les clients n’achètent donc pas uniquement un produit mais bien un univers - cf. Sinek.
Pour les plus gourmands d’entre vous que le conflit n'effraie pas, la métaphore marche aussi avec la pizza (plutôt Margarita ou Hawaïenne ?) 😬
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🦈 Tu préfères la salle zen ou les transats ?
Ce rapport des écoles à leur image de marque se voit essentiellement pendant la période estivale des admissibilités. Si l’on étudie la façon dont est pensée l’expérience de chacun·e, on remarque que les écoles ont soigneusement balisé l’expérience pour signifier qui la fiabilité, qui l’excellence, ou qui la bonne ambiance. Discours de l’équipe dirigeante, présentation de parcours d’alumni inspirants, jeux et salle zen sont autant d’indices utilisés pour souligner les caractères voulus. Car les entretiens sont un processus à double sens. Convaincre de l’exceptionnelle qualité de son service en une journée, telle est la mission. À la clef ? Un contrat éducatif de 4 ans dans un cadre apparemment idyllique.
« J’avoue m’être dit que l’école avait l’air très relax par rapport à d’autres. Les transats dans la cour, etc. ça m’a tout de suite mis·e à l’aise »
(Si la bible de l’admissible - le SIGEM - dicte les mouvements stratégiques des aspirant·es étudiant·es, ces menus détails jouent un rôle prépondérant pour des écoles à classement et réputation relativement similaires. La preuve étant, certaines écoles mettent un point d’honneur à ne pas bouger dans le classement)
« On a pas deux fois l’occasion de faire une première (bonne) impression » 🙆
L’épreuve était de taille auparavant, elle n’en devient que plus intéressante avec la crise du COVID19. À l’heure du digital, comment réinventer cette expérience client dématérialisée ? aka, comment faire pour tisser des liens, miser sur l’excellence académique, l’ambiance ?
💡 Business Schools and their contribution to society
Snack break - on - de la simple école à “l’expérience apprenante” 🐚
Mais d’où vient cette conception de l’enseignement ? Et cette compétition entre établissements ? Une partie de la réponse se trouve dans les années 1990, vécues comme une profonde crise existentielle des écoles. Former une élite ne suffit plus. Le modèle éducatif devenu obsolète se doit d’être repensé. Finie la “simple” école, chaque institution cherchant désormais un moyen d’offrir une expérience riche et différenciante à ses étudiant·es. Pour amorcer le changement, certaines écoles fusionnent, d’autres jouent sur leur marque… bref tous se réinventent dans un contexte où la demande, elle, augmente.
La question à 1 000€ dans ce nouveau paysage éducatif devenant alors : comment reconnaître LA meilleure école ?
« University business education has become, even in the discourse of faculty, an ‘industry’ serving students who are now described as ‘customers’ and who often base their choice of school on media rankings, measuring factors such as the starting salaries of graduates and the quality of the services provided to corporate recruiters » Mette Morsing & Alfons Sauquet Rovira
La théorie des auteurs est sans appel. Les nineties ne riment pas uniquement avec Friends, elles permettent aussi aux nouvelles écoles d’éclore avec leurs nouveaux modes de communication, bien proche des entreprises classiques.
NOTE
L’ouvrage se concentre sur l’évolution des écoles Outre-Atlantiques, mais cela s’applique à mon sens aussi très bien au modèle Européen et Français.
Snack break - over 🐚
🐟 Tous·tes différent·es ?
« Être original c’est être contemporain de son temps. On se croit original parce qu’on ne voit pas encore que tous sont pareils, que toutes les femmes dans la rue ont l’air de Renoir. Avec le recul, c’est ce qui frappe, mais sur le moment, on ne le sait pas » Antoine Compagnon
On vient de le voir, dans un contexte d'industrialisation de l’enseignement supérieur, trouver un critère de différenciation est clef. Mais dans quelles mesures est-ce encore possible aujourd’hui ?
Je parlais tout à l’heure d’uniformisation des équipes pédagogiques. Il apparaîtrait que les stratégies de développement des écoles semblent être elles aussi relativement similaires (cf. Le Point).
La course aux campus avec la ruée vers les BRICS et plus particulièrement l’Est 🏃♀️ Nombreuses sont les écoles qui ont, ces dernières années, démultiplié les partenariats d’échange et/ou ouvert un campus en Asie.
À l’image des grandes marques, il semblerait aussi que les écoles de commerce optent pour une uniformisation de leur image de marque – tant en terme de logos que de noms. Ainsi, Business School est devenu un terme incontournable supposé à la fois soutenir l’internationalisation des institutions et appuyer la globalisation de notre éducation.
Une offre pédagogique proche. Que ce soit par envie de devancer les autres ou de passer à côté d’une innovation majeure, il est courant que les écoles se tournent vers les mêmes acteurs pour étoffer leur catalogue de cours. Ceux-ci n’étant pas encore nombreux sur le marché, cela expliquerait donc peut-être aussi la similitude des programmes aujourd’hui(les premiers incubateurs EdTech n’ont ouvert qu’en 2018 en France).
« Quand je parle avec un·e responsable de programme, on me demande toujours “mais que fait un·e tel·le ? Ont-ils aussi fait appel à ta solution ? Pour combien d’élèves ? De quelle façon ?” Je dois souvent rassurer mon premier client sur le fait que c’est bien la première école à avoir adopté mon dispositif de façon aussi originale – même si d’autres ont suivi. C’est un petit monde »
On remarque donc bien une tendance à l’uniformisation globale, tant des programmes, des marques, ou des ambitions de chaque école. Ceci peut nous laisser naturellement en droit de s’interroger sur la pertinence des classements – surtout lorsqu’on regarde ensuite la notoriété effective des écoles à l’étranger.
👀 So what ?
« Plus ça va plus je vois que l’image que l’école renvoie est celle à laquelle on est assimilés »
Lorsqu’on se penche le positionnement des écoles, il apparaît que les stratégies adoptées en interne sont relativement proches. Je ne sais pas toi, mais je me demande maintenant si cette similitude des programmes n’explique pas celle des profils à la sortie… et donc de nos carrières 🤷♀️
On me lance souvent un « Ha, vous les em ! » pour désigner les cohortes d’entrepreneurs et ceux qui se sont orientés dans l’accompagnement après leurs études. Mais peut-être que derrière cette boutade se cache, en creux, la réalité du lissage de nos ambitions.
« On croit être original, et on s’aperçoit qu’on a juste été typique » Antoine Compagnon
👉 Si tu fais partie de ceux qui ont tout envoyé valser pendant leur confinement, tu peux aller écouter quelques témoignages de reconversion sur Pourquoi pas moi